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Approche novatrice en matière de technologie relative aux nurseries pour la production de naissains de panopes du Pacifique de grande taille : maillon manquant pour l'aquaculture de la panope en Colombie-Britannique

Rapport définitif
Nova Harvest Ltd
PIAAM 2012-P09

Sommaire

Les larves de panope nécessaires à l'industrie de l'aquaculture de la Colombie-Britannique sont disponibles pendant des périodes saisonnières limitées, sur une base semi-continue à une longueur de coquille variant entre 5 et 8 mm. De plus, le taux de mortalité est élevé par rapport au coût. Le projet avait pour but de pallier la pénurie de stock de naissain de panopes et de créer un produit pouvant être transféré toute l'année.

Son principal objectif était de mettre au point une technologie novatrice permettant de fournir aux producteurs des larves de panope de grande qualité dont la longueur de coquille est supérieure à 30 mm. Son objectif à long terme est de fournir de façon continue des naissains de panopes aux producteurs et aux propriétaires de tenure. Les naissains de grande qualité que nous avons produits ont été élevés dans une nurserie terrestre et une nurserie suspendue au-dessus du plancher océanique chez Nova Harvest Ltd, à Bamfield, en Colombie-Britannique. À l'heure actuelle, nous intégrons les résultats novateurs obtenus dans la nurserie terrestre aux opérations de l'écloserie de Nova Harvest Ltd.

En raison d'une importante perte au cours de l'élevage des larves, nous avons effectué des essais en nurserie avec un nombre moins élevé de larves que prévu. Néanmoins, les résultats obtenus dans la nurserie terrestre ont été satisfaisants : taux de survie 13 % plus élevé, taux de croissance de la longueur de coquille maximum de 64 µm/jour (du 4 décembre 2012 au 4 mai 2013) et longueur de coquille finale variant entre 18,1 et 18,3 mm. Les résultats obtenus dans la nurserie océanique étaient les suivants : taux de croissance de la longueur de coquille maximum de 48 µm/jour et longueur de coquille définitive de 15,9 mm. Les larves élevées dans la nurserie terrestre ont connu un meilleur taux de survie, de meilleurs taux de croissance en général et une longueur de coquille plus élevée que celles de la nurserie océanique. À la lumière de ces résultats initiaux prometteurs pour la nurserie terrestre, Nova Harvest Ltd poursuivra les essais avec la technologie novatrice en vue d'optimiser les taux de croissance et la survie des naissains transférés.

La technologie mise au point dans le cadre du Programme d'innovation en aquaculture et d'accès au marché (PIAAM) a directement favorisé la productivité et l'orientation de notre système d'approvisionnement en naissains de panopes chez Nova Harvest Ltd, comparativement aux opérations actuelles. Le projet a également eu pour effet de diversifier les débouchés pour l'entreprise à différents niveaux de l'industrie de l'aquaculture de la panope.

De plus, le projet correspond aux priorités du PIAAM en matière de durabilité environnementale (recyclage des aliments à base d'algues), sociale (interaction avec l'industrie de l'aquaculture de la panope et le Bamfield Marine Sciences Centre) et économique (création d'emplois dans les communautés rurales).

Introduction générale

La panope (Panope abrupta) est une nouvelle espèce d'aquaculture de grande valeur en Colombie-Britannique, dont le potentiel économique est considérable pour les communautés rurales. L'industrie en est encore à l'étape de développement même après plus de dix ans en raison de nombreux problèmes, notamment l'approvisionnement inégal en stock de naissains. Les larves de panope sont disponibles sur une base semi-continue à une longueur de coquille variant entre 5 et 8 mm. Le taux de mortalité est élevé par rapport au coût, et la saison d'ensemencement est très courte. En raison de l'investissement élevé nécessaire pour acheter et ensemencer les naissains de panopes, les producteurs prennent de grands risques lorsqu'ils ensemencent de petits naissains à la valeur marchande actuelle. Afin de gagner la confiance des producteurs qui appuieront l'investissement dans l'industrie de l'aquaculture de la panope et la croissance de cette industrie, Nova Harvest Ltd a créé une nurserie terrestre pour la production de naissains de panopes de qualité dans un système imitant les conditions d'ensemencement, le conditionnement thermique préalable à l'ensemencement et l'apprentissage de l'évitement des prédateurs.

Une nurserie de mollusques a pour but de produire des larves jusqu'à une taille appropriée pour l'ensemencement ou le grossissement. Il existe deux grands types de nurserie de mollusques : les nurseries primaires servent au stade d'établissement et de métamorphose des larves, et les nurseries secondaires servent au grossissement ultérieur, lorsque la longueur de la coquille est d'au moins 1 mm. Le projet mettait l'accent sur les innovations ciblant les nurseries secondaires afin d'assurer une croissance efficace et un taux de survie élevé des larves de panope pendant l'hiver, à une longueur de coquille cible supérieure à 30 mm.

Le comportement d'enfouissement et la morphologie uniques de la panope empêchent l'utilisation de la technologie existante pour assurer la croissance continue au cours du grossissement des larves. Il est important que la panope soit placée sur le sable le plus tôt possible au cours du cycle de production des larves afin d'en assurer le développement approprié, la santé et la capacité à creuser lorsqu'elles seront transférées dans une tenure. Les tentatives précédentes visant à intégrer des plateaux de sable dans le système FLUPSY (« système flottant de remontée d'eau ») ont été parsemées d'embûches, notamment le coût élevé de l'investissement initial, les biosalissures et la faible densité de mise en charge. La technique n'a donc pas été adoptée à l'échelle commerciale. Un autre type de nurserie consiste en une poche en filet déposée sur une couche de sable, puis remplie d'un naissain et placée sur le plancher océanique. Les inconvénients de ce type de nurserie sont le coût élevé du temps de plongée nécessaire pour l'entretien, l'exposition aux prédateurs de fond, le taux de survie très variable et le faible nombre de naissains que chaque système est en mesure de contenir. Pour améliorer les nurseries existantes, un essai novateur a été effectué avec des réservoirs de sable empilables (pour assurer une densité d'élevage élevée). L'aménagement nous a permis de régler les problèmes de densité et de réaliser des économies d'échelle grâce à une augmentation de la capacité de production.

La nurserie terrestre comprend 39 réservoirs remplis de 30 m2 de substrat sableux dans lesquels il est possible d'élever environ 500 000 juvéniles de panopes jusqu'à une longueur de coquille de 30 mm. Les naissains qui se trouvent dans les réservoirs de sable remplis sont nourris avec des microalgues cultivées dans deux grandes serres contenant 40 réservoirs de 1 500 l. Ces réservoirs d'algues sont initialement inoculés par 2 photobioréacteurs de 1 000 l et de nombreuses poches de culture de 450 l. Les microalgues peuvent aussi être produites à partir d'eau de mer non traitée et de l'eau effluente de la nurserie contenant des microalgues non mangées et des déchets métaboliques qui agissent comme des éléments nutritifs. Un des plus grands défis à relever relativement à l'exploitation d'une nurserie est de fournir suffisamment d'algues pour assurer des taux de croissance allométrique. Nous avons grandement amélioré l'efficience opérationnelle de la nurserie terrestre en faisant proliférer de nouveau l'algue recyclée au moyen d'une boucle de réutilisation de l'eau.

Nous avons aussi exploré l'option d'une nurserie océanique flottante afin de comparer les avantages et la rentabilité des deux types de nurserie. Les avantages d'une nurserie flottante sont la disponibilité des microalgues naturelles, la faible prédation attribuable au fait que les stocks sont suspendus dans une colonne d'eau ainsi que la réduction des coûts généraux et d'exploitation. Notre nurserie flottante comprenait des plateaux à huîtres empilables modifiés remplis de sable et suspendus à un radeau. Nous sommes en pleine discussion au sujet d'une proposition de conception novatrice qui consiste à ajouter du sable sur les plateaux et à suspendre un réservoir de fibre de verre pour y mettre les plateaux aux fins d'alimentation.

Notre nurserie terrestre et notre nurserie océanique reposent sur la technologie existante et des adaptations novatrices afin d'améliorer l'efficience opérationnelle du système et ainsi assurer une production rentable de larves de panope de grande taille. 

Les priorités du PIAAM prises en compte au cours de la réalisation du projet sont les suivantes :

Nurserie terrestre

Introduction

L'avantage d'une nurserie terrestre est le contrôle des conditions environnementales, de la disponibilité de la nourriture, de l'accessibilité et des prédateurs. La nurserie consiste en de multiples réservoirs placés dans une serre liés à des réservoirs extérieurs parallèles contenant des algues, où les déchets des larves et les algues non mangées sont mélangés à l'eau de mer non traitée afin que les algues prolifèrent. Les réservoirs de culture d'algues servent de biofiltres pour le système en convertissant les déchets azotés en aliments pour les algues et en permettant aux algues non mangées de passer dans le système à plusieurs reprises avant d'être éliminés. Les déchets produits par les panopes à la suite de la conversion des algues en biomasse sont réutilisés pour la prolifération des algues sous la lumière du soleil. La boucle de réutilisation facilite la collecte de l'énergie de rayonnement du soleil afin de maintenir une température plus élevée que la température ambiante et de fournir de meilleures conditions de croissance. La réutilisation de l'eau et de la chaleur améliore l'efficience opérationnelle du système, ce qui se traduit par un taux de croissance élevé, une utilisation efficace de la nourriture ainsi qu'une réduction des besoins en énergie. Le but d'une nurserie terrestre est d'optimiser le système pour obtenir un taux de croissance et de survie élevé, en tirant pleinement profit du contrôle que le système permet.

Méthodologie

Nous avons modifié les réservoirs intérieurs de la nurserie afin de créer un système de semi-recyclage. Nous avons ajouté un conduit vertical à des réservoirs circulaires à fond pentu (nombre total de réservoirs : 39). De cette façon, le sable restait à une profondeur de 10 cm dans chaque réservoir. Des trous (3; 2 mm de diamètre) ont été percés dans le fond du conduit vertical afin de drainer le réservoir et d'injecter de l'eau oxygénée dans le sable et ainsi maintenir les conditions aérobies. Nous avons inséré un deuxième conduit vertical dans la partie supérieure du conduit retenant le sable afin de garder le niveau de l'eau à 15 cm au-dessus du sable. Les réservoirs ont été empilés en trois rangées distinctes de 13 colonnes. L'eau circule par gravité dans chaque réservoir à partir du réservoir du haut. Chaque colonne de réservoirs est liée à un tuyau de vidange de 3 po, qui aboutit à un réservoir collecteur de 600 l doté de pompes à 2 hp. Une partie de l'eau du réservoir collecteur était recyclée et retournée dans les réservoirs de la nurserie, alors que le reste de l'eau récoltée était envoyée dans la serre pour y faire proliférer les algues ou éliminée. L'eau était envoyée dans la serre et distribuée dans les 40 réservoirs rectangulaires statiques d'une capacité de 1 500 l chacun. Ces réservoirs statiques servaient à stimuler la prolifération des algues, et l'eau qu'ils contenaient était redistribuée dans la nurserie pour alimenter les naissains de panopes. La boucle de réutilisation des algues est un facteur clé de l'efficience opérationnelle de la nurserie terrestre.

En raison d'une importante perte au cours de l'élevage des larves, nous avons effectué des essais en nurserie avec un nombre moins élevé de naissains que prévu. La nurserie terrestre a fait l'objet d'un essai avec un taux de mise en charge initial de 50 000 larves dans 4 réservoirs, à une densité de 1,6 larve/cm2. En raison de la faible densité de mise en charge dans les réservoirs de la nurserie, il y a eu un surplus de production de nourriture. Lorsque la nurserie fonctionnait à plein rendement, il fallait entre 3 et 8 l d'algues par minute, avec une densité cellulaire minimale de 1,5 million cellules/ml. L'eau contenant les algues utilisées pour alimenter les naissains de la nurserie était remplacée dans la serre au même débit que l'eau de trop-plein de la nurserie, qui contenait des métabolites, des algues non mangées et des fèces non décantées. Les protocoles relatifs à la serre et à la prolifération des algues font l'objet d'une discussion dans la partie sur la production des algues dans les pages qui suivent.

En ce qui concerne l'entretien, un changement d'eau complet (5 000 l) était effectué une fois par jour afin d'empêcher le dépôt des sédiments dans les conduites d'eau. L'eau de mer non traitée était distribuée dans les réservoirs de la nurserie à un débit de 15 l/minute. L'eau contenant les algues distribuée dans la nurserie provenait de l'une des 2 serres d'une capacité de 60 000 l (répartie dans 40 réservoirs rectangulaires) et pouvant produire jusqu'à 12 000 l d'algues/jour. Lorsque c'était possible, nous avons intégré des algues supplémentaires produites par 2 photobioréacteurs afin de maintenir la densité cellulaire à 80 000 cellulaires/ml.

Pendant la même période d'essai, un groupe de contrôle de larves de panope d'une longueur de coquille de 8,7 mm a été placé dans un plateau à huîtres (60 cm x 60 cm x 25 cm) contenant 15 cm de sable. Nous avons maintenu le groupe de contrôle à la température ambiante de l'eau de mer non traitée pour toute la durée de l'essai de la nurserie terrestre et de la nurserie océanique. Les données sur les paramètres de croissance et environnementaux ont été recueillies chaque mois, de décembre 2012 à mai 2013, et les données sur le taux de survie ont été recueillies en mai 2013.

Résultats

La P. generosa avait une longueur de coquille plus grande, une masse plus élevée, un taux de survie supérieur, de meilleures capacités d'enfouissement et une relation taille-poids normale comparativement au groupe de contrôle. La longueur de coquille moyenne des larves se trouvant dans la nurserie terrestre était de 18,3 mm comparativement à 11,2 mm pour le sous-groupe de contrôle. Le poids humide total a augmenté à 3,1 g comparativement à un poids moyen final de 0,42 g pour les larves du groupe de contrôle. De plus, le taux de survie de la nurserie terrestre était supérieur de 53 % à celui du groupe de contrôle. Les larves de la nurserie terrestre s'étaient enfouies à une profondeur variant entre 7 et 9 cm alors que celles du groupe de contrôle s'étaient enfouies à une profondeur variant entre 3 et 7 cm. Enfin, les larves de la nurserie terrestre avaient un ratio taille-poids comparable aux autres bivalves vivant dans leur habitat naturel. En général, notre nurserie terrestre a favorisé la croissance, une faible mortalité et les comportements (profondeur d'enfouissement) qui permettent aux juvéniles de mieux survivre au cours des stades de transfert.

Nurserie océanique

Méthodologie

Nous avons modifié des plateaux à huîtres pour y placer des juvéniles de P. generosa dans un substrat sableux. Le sable a été versé (filet de 2 mm) dans les plateaux recouverts d'un revêtement procurant 70 % d'ombre et situés à une profondeur de 15 cm. Avant de les mettre en charge, nous avons mesuré la longueur totale et le poids des juvéniles. Nous leur avons laissé deux jours pour s'acclimater et s'enfoncer avant de les placer dans l'océan. Un plateau de contrôle a été créé avec un naissain de l'écloserie qui était alimenté par l'eau de mer non traitée à la température ambiante.

Les plateaux ensemencés ont été placés dans l'océan le 5 décembre 2012. Nous avons ancré un radeau à un emplacement d'une profondeur de 10 m, au sud-ouest de l'île Tzardus (latitude : 48.902288 et longitude : -125.083133). Les plateaux de la nurserie ont été suspendus au radeau, à une profondeur de 2 m. Ils ont été laissés en contact avec l'environnement comme un système ouvert. Chaque mois, nous avons mesuré la longueur de coquille moyenne et le poids moyen de sous-échantillons et le 4 mai 2013, nous avons sorti les plateaux pour calculer le taux de croissance totale et le taux de survie.

Nous avions initialement prévu de suspendre un réservoir d'alimentation à la nurserie océanique qui devait entourer les plateaux et communiquer avec la surface afin de nous permettre d'ajouter régulièrement des aliments dans le cycle de croissance. Les essais initiaux effectués sur des réservoirs et des récipients ressemblant à des poches n'ont pas été fructueux. Le plus grand défi du confinement de la nurserie océanique est venu de l'effet déstabilisant du grand réservoir directement attaché au radeau, qui supportait aussi le poids des plateaux remplis de sable. Une solution possible pour régler le problème était de choisir un emplacement qui permettrait au réservoir d'alimentation de reposer sur le plancher océanique tout en restant fixé à la structure flottante. Ce n'était malheureusement pas possible à l'emplacement que nous avions choisi. Le dépôt du réservoir d'alimentation sur le plancher océanique aurait résolu le problème d'alimentation causé par le réservoir submergé lorsque la structure flottante se relève < cause de la houle. Autrement, les appareils de flottaison améliorés ou une structure permanente nous permettraient de contenir et de donner la nourriture pendant les mois d'hiver dans la nurserie océanique.

La perte importante survenue au cours de l'élevage des larves a entraîné une pénurie de larves pour l'essai dans la nurserie océanique. En raison du nombre limité de larves utilisées pour l'essai, des dépenses liées au transport de l'alimentation jusqu'à la nurserie océanique et des problèmes de conception relatifs à la suspension du réservoir submergé, nous avons décidé de concentrer nos efforts sur la nurserie terrestre puisque ses résultats immédiats étaient prometteurs.

Résultats

La P. generosa de la nurserie océanique avait une longueur de coquille plus grande, une masse plus élevée, un taux de survie supérieur, de meilleures capacités d'enfouissement et un ratio taille-poids normal comparativement au groupe de contrôle du réservoir océanique de l'écloserie. Les conditions océaniques de la nurserie océanique sont demeurées dans les échelles prévues tout au long de la période d'essai. La longueur de coquille a atteint 15,9 mm comparativement à 11,2 mm pour les larves de contrôle. Le poids a également augmenté : 1,3 g comparativement à 0,42 g pour les larves de contrôle. Le taux de survie des larves placées dans l'océan était plus élevé d'environ 40 %, et leur profondeur d'enfouissement moyenne variait entre 8 et 11 cm par rapport à 3 et 7 cm pour le groupe de contrôle. Comme pour la nurserie terrestre, les juvéniles élevés dans la nurserie océanique avaient une relation taille-poids comparable aux autres bivalves vivant dans leur habitat naturel. De façon générale, la nurserie océanique assure une croissance normale et un taux de survie élevé, mais il faut se pencher davantage sur les problèmes relatifs à l'augmentation des quantités à l'échelle commerciale.

Prochaines étapes

L'ajout d'autres suppléments alimentaires augmenterait le taux de croissance des juvéniles pendant l'hiver dans le système océanique. Cependant, les efforts et le coût de production des microalgues et de confinement de la nourriture autour des plateaux suspendus ne justifiaient pas les essais. Par exemple, les appareils de flottaison nécessaires pour garder les plateaux empilables remplis de sable et les réservoirs d'alimentation supplémentaires à flot n'étaient pas raisonnables. De plus, des algues supplémentaires devraient être transportées chaque semaine jusqu'à la nurserie flottante, ce qui ne serait pas raisonnable dans un cadre de production continue.

Fait surprenant, les biosalissures étaient minimales, et seulement de petits amas de microalgues se sont attachés à l'extérieur des plateaux. La mise en place hivernale et la profondeur des plateaux sont probablement les principaux facteurs ayant contribué au fait qu'il y avait peu de biosalissures. Comme nous avons mis les plateaux en place le 5 décembre 2012, la plupart des organismes responsables des biosalissures s'étaient déjà installés sur leurs substrats respectifs, hors de la colonne d'eau. De plus, les biosalissures minimales pourraient aussi être attribuables au fait que nous avons (aléatoirement) choisi de placer les plateaux à une profondeur de 2 m.

Conclusions

La nurserie océanique a produit des juvéniles de panope de grande qualité, avec un minimum d'intrants. Sans égard à l'apport limité en nourriture pendant l'hiver, les juvéniles élevés sur le terrain étaient plus grands et mieux adaptés au transfert éventuel dans des tenures marines. Bien que le taux de croissance soit supérieur d'avril à la fin de septembre, la réduction de la densité du plancton au moment de la mise en charge de la nurserie a réduit au minimum le problème de dépôt de biosalissures sur les plateaux. Les prochains efforts seront axés sur la variabilité d'échelle de la nurserie océanique puisqu'il s'agit d'un outil prometteur pour les naissains en hivernation (pertes minimales attribuables aux prédateurs et croissance accrue si les naissains sont mis en charge pendant les périodes de prolifération naturelle).

Production d'algues

Méthodes

Les algues nécessaires au régime des larves en nurserie océanique ont été cultivées pendant l'hiver dans 40 réservoirs de 1 400 l, placés dans 2 serres situées sur place. Les espèces d'algue (Tetraselmis suecica et Skeletonema costatum) ont été cultivées à partir de cultures à une densité variant entre 1 et 1,5 million cellules/ml. Tous les réservoirs se trouvaient dans une serre extérieure, à des conditions ambiantes (éclairage et température). Pour inoculer les réservoirs de départ, de 25 à 50 l de chaque espèce ont été transférés dans 1 400 l d'eau de mer non traitée. Le processus a été effectué dans cinq réservoirs par espèce, tous les quatre à sept jours, selon le temps nécessaire pour obtenir des densités récoltables. 

Afin de choisir des espèces d'algue locales (diatomées), de l'eau de mer non traitée a été fertilisée avec du F/2 et du silicate puis oxygénée jusqu'à ce qu'une culture stable pousse. L'algue prédominante qui a poussé dans l'eau de mer non traitée est Skeletonema (comme diatomée). 

Les réservoirs d'algues ont été fertilisés avec les quantités appropriées de F/2 et de silicate chaque semaine, et la croissance des algues a été surveillée. Nous n'avons pas activement régulé le pH puisqu'aucune lumière artificielle n'a été utilisée, ce qui a permis aux cultures de pousser dans des conditions de pH variant selon la lumière et la noirceur naturelles. 

Bioréacteurs pour la production d'algues

En 2013, une nouvelle technologie a été lancée pour la production de microalgues au moyen d'un bioréacteur automatisé conçu et fabriqué par une entreprise de Victoria (Colombie-Britannique) : Industrial Plankton. Nova Harvest Ltd. a loué les deux premiers appareils de production disponibles afin d'augmenter considérablement la capacité de production d'algues. Chaque appareil pouvait produire jusqu'à 300 L de microalgues à densité élevée par jour. Une fois atteinte l'augmentation de la densité cellulaire, la gestion et la récolte ont été entièrement automatisées grâce à des paramètres personnalisables. Les réacteurs ont principalement été utilisés pour produire des microalgues des espèces Tetraselmis sp. et Isochrysis sp. (T-Iso), qui étaient envoyées directement à la nurserie terrestre, de façon continue. Les algues produites dans les réacteurs ont aussi été utilisées comme inoculateurs pour les réservoirs de production d'algues placés dans la serre décrits précédemment.

Résultats et prochaines étapes

Les cultures de Tetraselmis sp. et de Skeletonema costatum ont atteint des concentrations récoltables après 7 à 14 jours, dans des conditions hivernales naturelles. Environ 1 400 l/réservoir (5 réservoirs par espèce) de chaque espèce ont été cultivés jusqu'à une densité de 1,5 million de cellules/ml. Du F/2 et du silicate ont été ajoutés au cours de l'inoculation initiale. La période nécessaire pour atteindre une densité d'algues récoltable a grandement varié en raison de la chute des températures pendant la nuit, ce qui a ralenti le cycle de croissance. À l'avenir, nous explorerons les méthodes de captage de la chaleur le jour afin de l'emmagasiner puis de la transférer aux réservoirs d'algues la nuit. L'augmentation de la concentration lumineuse dans les réservoirs de culture améliorerait le taux de croissance et le rendement, mais jusqu'à présent, nous n'avons obtenu qu'une photopériode acceptable pour la production de diatomées, à condition que les températures soient maintenues à un seuil de tolérance.

Les bioréacteurs d'algues semblent être une solution rentable pour produire des volumes élevés de microalgues denses pour alimenter directement la nurserie et inoculer des volumes élevés de culture. L'automatisation intégrale nous a permis d'ajouter deux appareils sans avoir à embaucher de la main-d'œuvre supplémentaire. Nous avons donc efficacement augmenté notre production journalière d'algues de 600 l, à une densité de 6 millions de cellules/ml. La densité uniforme des cellules récoltées dans les réacteurs nous a permis d'automatiser les processus d'écloserie en aval, ce qui n'était pas facilement réalisable avec la procédure traditionnelle de production d'algues. L'avantage le plus important des bioréacteurs d'Industrial Plankton est l'automatisation : en effet, cela permet de réduire la main-d'œuvre nécessaire à chaque étape du cycle de production suivant l'inoculation. Comme la production d'algues représente le plus grand défi dans une écloserie de mollusques, tant pour la qualité que la quantité, les bioréacteurs créés par Industrial Plankton permettront d'améliorer l'efficience opérationnelle des écloseries lorsque la technologie sera adoptée par l'industrie.

Conclusions générales

En raison de l'importante perte survenue au cours de l'élevage des larves, les essais de la nurserie terrestre et de la nurserie océanique ont respectivement été ensemencées avec 50 000 et 5 000 larves, ce qui était inférieur aux quantités prévues. Conséquemment, nous avons réalisé les essais avec 10 % de la capacité totale de naissain pour la nurserie terrestre, et moins d'efforts ont été déployés pour la nurserie océanique. Malgré les obstacles, les larves de la nurserie terrestre ont connu un taux de survie 53 % plus élevé que celui du groupe de contrôle, un taux de croissance maximal de 64 µm/jour et une longueur de coquille finale variant entre 18,1 et 18,3 mm. Le taux de croissance et la longueur de coquille finale des larves de la nurserie océanique sont étonnants : 48 µm/jour et 15,9 mm. Leur taux de survie est également plus élevé (40 %) que celui du groupe de contrôle. Néanmoins, le taux de croissance et la longueur de coquille des larves de la nurserie terrestre étaient meilleurs que ceux des larves de la nurserie océanique. 

Le taux de croissance observé dans la nurserie terrestre n'est nullement optimal et pourrait être grandement amélioré. L'évaluation et les modifications du système de recyclage de la nurserie terrestre sont en cours, en vue de la préparation pour la saison d'ensemencement des panopes de 2014. Notre système de réutilisation des microalgues, l'utilisation de photobioréacteurs hautement efficaces, les densités de mise en charge et les températures d'élevage des larves feront aussi l'objet d'un examen afin de maximiser le taux de croissance dans la nurserie terrestre.

Les résultats prometteurs obtenus dans la nurserie terrestre pourraient profiter aux producteurs de mollusques de grande taille (fausse-mactre, panope ou mye) de la côte est. Les producteurs obtiendront un meilleur taux de survie et une production constante de larves de grande taille pendant les périodes de pointe de transfert. L'amélioration du taux de survie des naissains favorisera l'implantation de l'industrie de l'aquaculture de la panope en Colombie-Britannique tout en augmentant le rendement du capital investi pour établir les opérations aquacoles liées à la panope. Par conséquent, les résultats et l'amélioration continue de la technologie augmenteront la valeur de l'industrie de la conchyliculture en Colombie-Britannique et sa capacité à se forger une place sur le marché international, tout en stimulant une industrie qui créera des emplois et des possibilités d'investissement dans les communautés rurales de la Colombie-Britannique.

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