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Document de recherche 2011/130

Conséquences pour la gestion de la fermeture des estuaires à la chasse des bélugas au Nunavik

Par T. Doniol-Valcroze, V. Lesage et M.O. Hammill

Résumé

Durant l’été au Nunavik, les bélugas (Delphinapterus leucas) se rassemblent en grands nombres dans les estuaires. Les Inuits chassent des bélugas provenant d’un mélange de plusieurs stocks définis d’après leurs aires de distribution estivale. Les processus permettant la fidélité à une aire d’estivage sont encore mal connus, mais puisque les jeunes bélugas passent deux à trois ans auprès de leur mère, il est possible que des transferts d’information entre jeunes et adultes constituent la base de l’apprentissage des chemins migratoires et de la fidélité au site.

Dans les années 1980, les basses estimations d’abondance des bélugas de l’est de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava ont entrainé la mise en place de limites sur les nombre de prises ainsi que des fermetures régionales. Ces fermetures incluent la création d’un sanctuaire permanent dans le sud de la baie d’Ungava, aux rivières à la Baleine, Mucalic, Tuctuc and Tunulic (1986), et des fermetures saisonnières pour la rivière Nastapoka (1990) et la petite rivière à la Baleine (1995), dans l’est de la baie d’Hudson. Dans ce document, nous examinons les raisons scientifiques de garder ces estuaires fermés à la chasse, et les impacts de ces fermetures sur les stocks de bélugas et leur gestion au Nunavik.

Les données de télémétrie satellite confirment que les bélugas font preuve de fidélité à certains estuaires au sein de la même saison. La majorité des individus équipés d’émetteurs satellites à la Nastapoka et la petite rivière à la Baleine ont effectué des allers-retours répétés sur le cours de plusieurs semaines, parcourant parfois plusieurs centaines de kilomètres, mais retournant toujours à proximité du site de déploiement. Ce patron a été observé pour les mâles et les femelles, mais le nombre d’allers-retours varie d’un individu à l’autre (de 0 à 12) ainsi que leur durée (d’un jour à un mois).

L’analyse des données de chasse montre que les bélugas sont plus susceptibles d’être capturés en grands nombres lors de chaque évènement de chasse à l’intérieur des estuaires qu’en dehors. Des analyses génétiques récentes ont montré que les bélugas tués le même jour au même site d’estivage partageaient fréquemment un lien de parenté. Puisqu’un plus grand nombre d’individus sont habituellement capturés lors de chaque évènement de chasse à l’intérieur des estuaires, il y est donc plus probable d’éliminer des groupes sociaux possédant la connaissance de différentes routes de migration. Cela pourrait ralentir la recolonisation d’aires d’estivage abandonnées, et limiter les échanges entre des stocks utilisant des routes de migration différentes.

La forte philopatrie qui caractérise les différents stocks estivaux les rend vulnérables à la surexploitation. À plus fine échelle, la dépendance envers un petit nombre d’estuaires spécifiques rend les bélugas particulièrement vulnérables à la perte d’habitat critique et a mené à leur disparition de plusieurs estuaires dans l’est de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava. La fermeture des estuaires visait à limiter les risques de surexploitation et à protéger l’habitat critique où les bélugas satisfont des besoins biologiques importants. Les deux estuaires qui ont été fermés à la chasse dans l’est de la baie d’Hudson sont les seuls dans lesquels des bélugas ont été observés régulièrement lors de relevés aériens côtiers au cours des 25 dernières années. Les autres estuaires paraissent désormais vacants, suite à un évitement des sites dérangés ou bien à l’élimination des groupes d’animaux qui les fréquentaient. La recolonisation des aires abandonnées a pu être limitée par la perte de savoir collectif de ces sites parmi les individus restants.

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