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Document de recherche 2013/124

Analyse des phycotoxines dans les bélugas de l’estuaire du Saint-Laurent 

Par Michael Scarratt, Sonia Michaud, Lena Measures et Michel Starr

Résumé

L'estuaire du Saint-Laurent est souvent sujet à des proliférations nuisibles (appelées familièrement « marées rouges ») du dinoflagellé toxique Alexandrium tamarense, qui peut causer des épidémies d'intoxication par phycotoxine paralysante, ce qui entraîne d'importants risques pour la santé des organismes marins et des êtres humains. Les toxines responsables de l'intoxication par phycotoxine paralysante peuvent être transmises par le réseau trophique, et il a été observé chez une panoplie d'organismes autres que des mollusques et des crustacés, dans l'estuaire du Saint-Laurent et ailleurs. Les toxines responsables de l'intoxication par phycotoxine paralysante et d'autres toxines provenant d'algues sont en partie responsables de la mort de mammifères marins de diverses espèces dans le monde entier, et leurs effets potentiels sur la population en voie de disparition de béluga de l'estuaire du Saint-Laurent constituent un sujet préoccupant, surtout à la suite de la forte prolifération de A. tamarense survenue en 2008, qui a coïncidé avec un nombre inhabituellement élevé de mortalités de bélugas sur une brève période. Entre 1995 et 2012, on a soumis à des tests 66 carcasses de bélugas s'étant échouées dans l'estuaire afin de déceler la présence des toxines responsables de l'intoxication par phycotoxine paralysante au moyen de techniques de chromatographie liquide à haute performance (CLHP) et de dosage immunoenzymatique. Au total, 18 des 66 animaux ont affiché des résultats positifs à la présence de saxitoxines dans un ou plusieurs échantillons de tissus, dont six durant la marée rouge de 2008. Un total de sept animaux ont affiché des résultats positifs dans plus d'un échantillon de tissus. Tous les résultats positifs ont été obtenus au cours des années où A. tamarense était relativement abondant, et il existe un lien positif entre les anomalies normalisées dans le nombre de mortalités et l'abondance cumulative de A. tamarense. L'occurrence simultanée des toxines responsables de l'intoxication par phycotoxine paralysante chez les espèces de proies et dans l'intestin de bélugas indique que les bélugas consommaient des proies intoxiquées, et l'absence d'autres maladies ou lésions évidentes (déterminées par une nécropsie) chez au moins un de ces animaux révèle que l'intoxication était probablement la cause ultime de la mort. Nous en avons conclu que les toxines des algues doivent être considérées comme des facteurs potentiels des mortalités inexpliquées de mammifères marins. Les effets potentiels des proliférations d'algues toxiques et de l'exposition chronique de faible intensité aux toxines sur les populations vulnérables de mammifères marins devraient être considérés comme préoccupants, surtout dans le contexte du changement climatique et de la fréquence visiblement croissante des proliférations d'algues toxiques à l'échelle mondiale.

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