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Fiches techniques du Programme coopératif de recherche et développement en aquaculture (PCRDA)
Fiche 5 - 2010 mai

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Évaluation de structures et de scénarios d'élevage en suspension du pétoncle géant (Placopecten magellanicus) aux îles-de-la-Madeleine, Québec

(PDF, 728 Ko)

Résumé

Une étude réalisée entre 2001 et 2004 à trois sites lagunaires des îles-de-la-Madeleine a permis d'examiner la survie, les pertes et la croissance de pétoncles géants élevés en suspension dans cinq types de structures : la ligne de boucles d'oreilles, le filet à pochettes, la ligne de paniers japonais, la poche ostréicole sur table et la lanterne Wang-Joncas. L'effet du nettoyage des structures a aussi été évalué. Bien que très variables, les résultats obtenus suggèrent un effet significatif du site et de la structure utilisée sur la survie des pétoncles. Les données de l'essai 2001 ont montré que les pertes de pétoncles ont été plus importantes dans les filets à pochettes et les lanternes Wang-Joncas que dans les paniers japonais et les poches ostréicoles sur table. Le nettoyage des structures a eu un effet variable et on n'a noté aucune tendance particulière. De façon générale, les pétoncles élevés en boucles d'oreilles et dans les filets à pochettes ont atteint de plus grandes tailles. D'ailleurs, l'ensemble des résultats techniques et biologiques tend à démontrer que ces deux types de structures seraient les plus appropriées pour l'élevage en milieu lagunaire aux îles-de-la-Madeleine. Les performances des pétoncles élevés dans ces structures pourraient être améliorées avec des nettoyages effectués à des moments appropriés pour réduire l'impact des moules sur les boucles d'oreilles et par des modifications de l'ouverture des filets à pochettes qui minimiseraient les pertes de pétoncles.

Introduction

Plusieurs structures d'élevage en suspension du pétoncle ont été testées depuis les années 1990 au Québec et dans les provinces maritimes. La majorité des expérimentations réalisées à ce jour ont toutefois été effectuées dans un cadre académique, sans tenir compte des activités et des pratiques des entreprises commerciales. L'intérêt principal de cette étude, réalisée entre 2001 et 2004 aux Iles-de-la-Madeleine, était de vérifier la performance des équipements disponibles dans le contexte des entreprises québécoises.

La présente fiche d'information décrit la méthodologie et les résultats de l'étude, dont les objectifs principaux étaient de comparer la survie, les pertes et la croissance de pétoncles géants mis en élevage dans cinq types de structures à trois sites lagunaires, et d'évaluer la quantité et l'impact des salissures biologiques sur ces structures.

Méthodes

L'étude a été réalisée à trois sites d'élevage aux îles-dela- Madeleine, soit GE1 et GE2, situés dans la lagune de la Grande Entrée et HAM, situé dans la lagune du Havre aux Maisons (Figure 1).

Water depth is approximately 6 m at the GE1, GE2 and HAM sites, and the nets were installed about 2 m below the water surface at each site.

Méthodes
Figure 1

Localisation des sites expérimentaux (GE1, GE2 et HAM) d'élevage du pétoncle géant aux îles-de-la-Madeleine en 2001 et 2002.

Des filières ont été installées à environ 2 m sous la surface de l'eau aux trois sites, tous d'une profondeur d'environ 6 m.

Les différentes structures testées étaient (Figure 2):

Les types de structures utilisées aux trois sites et pour les deux périodes de mise à l'eau ont été choisis en fonction des scénarios de production de chacune des entreprises impliquées dans le projet. à l'automne 2001, les structures FP, PJ, PO et WJ ont été mises à l'eau, puis échantillonnées après six mois, un an et deux ans. Une deuxième mise à l'eau a été réalisée au printemps 2002 avec les cinq types de structures et des échantillonnages ont été effectués après trois mois, un an et deux ans.

Pour les deux périodes de mise à l'eau, certaines structures ont été nettoyées en cours d'expérience afin de vérifier l'impact des salissures.

Les dates réelles d'échantillonnage ont légèrement varié selon les conditions climatiques et la disponibilité des entreprises. De plus, plusieurs structures ont été perdues entre juin 2003 et juin 2004 aux sites GE1 et GE2, possiblement au printemps lors du départ des glaces.

Quatre lots de pétoncles ont été utilisés selon le site et la période de mise en élevage. Ces pétoncles provenaient de deux cohortes différentes, soit 1999 et 2000. La taille moyenne initiale des pétoncles variait entre 37,6 et 63,9 mm selon le lot. Un total de 25 680 pétoncles et 120 structures ont été installés à l'automne 2001 et 45 880 pétoncles et 229 structures au printemps 2002.

à chaque échantillonnage, certaines structures ont été choisies au hasard, récupérées par bateau ou en plongée et ramenées à terre pour leur analyse. Pour évaluer la survie et les pertes des pétoncles mis en élevage, un dénombrement des pétoncles vivants et morts a été effectué pour chaque structure récupérée. La taille des pétoncles vivants et morts a également été mesurée afin d'évaluer leur croissance.

Au moment de la récupération des structures, la présence de prédateurs et de moules bleues (Mytilus edulis) à l'intérieur des structures a été notée. De plus, quatre méthodes ont été explorées pour quantifier les salissures présentes sur les différentes structures: poids par immersion de la structure, poids humide de la structure, poids sec des salissures et analyse photographique.

Résultats

Méthodes
Figure 2

Photographies illustrant les différentes structures d'élevage utilisées. De gauche à droite: la ligne de boucles d'oreilles (BO); le filet à pochettes (FP); la ligne de paniers japonais (PJ); la poche ostréicole (PO) sur table; la lanterne Wang-Joncas (WJ).

Survie des pétoncles

La survie des pétoncles mis en élevage à l'automne 2001 a été faible aux trois sites et dans toutes les structures dès le premier suivi (17 à 54 %). La survie a toutefois été supérieure pour les pétoncles mis en élevage au printemps 2002, les taux de survie atteignant 48 à 81 % après 3 mois, 49 à 77 % après 1 an et 31 à 58 % après 2 ans.

En raison de la perte de filières survenue au cours de l'essai 2002, seules les données de l'essai 2001 permettent de comparer la survie des pétoncles entre les trois sites après deux ans d'échantillonnage. Pour cet essai-là, la survie des pétoncles a été significativement plus faible au site HAM pour les deux structures comparées, soit WJ et FP. Le faible taux de survie observé à ce site ne serait pas nécessairement dû au site, mais possiblement au choc thermique subi par les pétoncles lors de la mise en structure ; la température de l'air, d'environ 0 °C, aurait pu induire un stress supplémentaire.

La survie des pétoncles deux ans après la mise en élevage de l'automne 2001 a été supérieure dans les structures FP et PJ au site GE1, et dans les FP au site GE2. Pour l'essai de 2002, la survie des pétoncles a été généralement supérieure dans les structures BO, PO et WJ après un an d'élevage. étant donnée la variabilité des résultats obtenus entre les sites et les essais, il est difficile de juger si une structure favorise la survie des pétoncles plus qu'une autre.

Perte de pétoncles

Deux ans après la mise à l'eau de 2001, c'est dans les structures FP et WJ sans nettoyage que les pertes ont été les plus importantes quel que soit le site, avec des valeurs situées entre 14,1 et 59,6 %. Les structures PJ et PO ont elles subi des pertes inférieures à 5,9 %. Les résultats de 2002 sont sensiblement les mêmes, les pertes étant plus élevées dans les BO, FP et WJ. Les pertes élevées de pétoncles pourraient être liées à la conception même de ces trois structures.

Il semble que les manipulations effectuées lors de la mise à l'eau et du nettoyage de ces structures occasionneraient les pertes de pétoncles. Le pectiniculteur devrait donc planifier et exécuter toutes manipulations des structures avec grand soin, voire les réduire autant que possible.

Croissance des pétoncles

Deux ans après la mise à l'eau de 2001, la taille moyenne des pétoncles est passée de 35-41 mm à 68-84 mm, selon le site et la structure. Les tailles moyennes les plus élevées ont été obtenues dans les structures FP à GE1 et GE2, et WJ à HAM.

Les pétoncles mis en élevage en 2002 sont passés d'une taille moyenne de 64 mm à 84-99 mm après deux ans de croissance au site HAM. Compte-tenu de la perte de plusieurs structures entre juin 2003 et juin 2004, il n'a pas été possible d'évaluer la croissance des pétoncles aux sites GE1 et GE2 après deux ans d'élevage. Les résultats obtenus un an après la mise en élevage du printemps 2002 montrent toutefois que la croissance des pétoncles était supérieure dans les FP et WJ à GE1, dans la WJ à GE2 et dans les BO et FP à HAM.

Dans l'ensemble, les pétoncles ont atteint une plus grande taille dans les structures BO et FP. Inversement, la croissance a généralement été inférieure dans les PO, des structures installées sur une table benthique.

étant donné que la température, et possiblement la salinité, étaient relativement similaires et stables dans les trois sites, d'autres facteurs comme la disponibilité de nourriture pourraient expliquer les variations de croissance des pétoncles. En théorie, les structures dites pélagiques (BO, FP, PJ et WJ) permettraient une meilleure croissance des pétoncles parce que ceux-ci ont accès à la nourriture sur toute la colonne d'eau. La conception de ces structures favoriserait aussi une meilleure circulation d'eau. Ainsi, les BO, sans filet protecteur, et les FP, avec leur filet à grandes mailles, offrent moins de résistance à la circulation d'eau, ce qui limite peu l'accès à la nourriture. De plus, ces types de structure permettraient aux pétoncles d'accumuler plus de réserves énergétiques en restreignant leurs mouvements.

Prédateurs et salissures

Les principaux prédateurs observés dans les structures ont été les crabes communs et les étoiles de mer. Les étoiles de mer étaient beaucoup plus abondantes que les crabes, les plus grands nombres (> 150 étoiles) étant observés dans les PO aux sites GE1 et GE2. Il y a eu peu ou pas de crabes dénombrés dans les FP et WJ comparativement à ceux dénombrés dans les PJ et PO. Il est essentiel que les structures ne touchent pas au fond, car alors la prédation peut s'accroître considérablement, surtout pour les structures BO et FP qui offrent peu de protection aux pétoncles.

Des quatre techniques utilisées pour évaluer la quantité de salissures, le calcul du poids sec s'est avéré la méthode la plus précise, quoique longue et fastidieuse. Plusieurs espèces de bivalves, de crustacés et d'autres invertébrés ont été observées. L'espèce qui domine parmi les salissures est sans contredit la moule bleue dont le poids sec représente parfois plus de 50 % du poids des salissures sur les structures WJ et BO à HAM. Les résultats obtenus indiquent que la structure la plus favorable aux salissures serait la WJ alors que la moins propice serait le FP.

Effet du nettoyage

Le nettoyage des structures a eu un effet variable sur la survie, les pertes et la croissance des pétoncles et aucune tendance apparente n'a été observée après un ou deux ans d'élevage. Si le nettoyage des structures n'entraîne pas une amélioration de la survie ou de la croissance des pétoncles, il offre néanmoins l'avantage important de maintenir la flottabilité. Des structures qui touchent le fond sont plus sujettes à être envahies par des prédateurs, en plus de maintenir les pétoncles dans un environnement défavorable à leur survie et à leur croissance.

Conclusions

Une évaluation détaillée des différentes structures a été réalisée en fonction de la survie, des pertes et de la croissance des pétoncles mis en élevage. La facilité de manutention, d'entretien, de nettoyage et d'entreposage des structures sont également des variables qui ont été considérées afin d'évaluer la fonctionnalité des structures.

L'ensemble des résultats, techniques et biologiques, tend à démontrer que les structures BO et FP seraient les plus intéressantes à utiliser pour l'élevage en milieu lagunaire aux îles-de-la-Madeleine. La survie et la croissance des pétoncles dans ces structures sont bonnes, en autant qu'elles ne touchent pas le fond car la prédation peut alors devenir importante. Des nettoyages effectués à des moments appropriés réduiraient l'impact des moules sur les BO. De plus, des modifications de l'ouverture des FP minimiseraient les pertes de pétoncles.

Des contraintes biologiques, des conditions climatiques parfois rigoureuses et des retards dans la réalisation des suivis ont eu pour effet d'augmenter la variabilité des résultats et de rendre parfois leur interprétation difficile. Malgré ces contraintes, les résultats obtenus devraient aider les pectiniculteurs dans leurs prises de décisions.


Ce projet (Q-01-06-005) du PCRDA a été le fruit d'un effort coopératif de Pêches et Océans Canada (Secteur des sciences), et Pétoncle 2000 et IMAQUA. Il est possible de communiquer avec un des scientifiques de ce projet, Sylvie Brulotte, à Sylvie.Brulotte@dfo-mpo.gc.ca.

Pour un complément d'information au sujet de ce projet ou d'autres projets du PCRDA, consultez :
/aquaculture/acrdp-pcrda/index-fra.htm.


Publié par:

Pêches et Océans Canada
Direction des sciences de l'aquaculture
Ottawa (Ontario) K1A 0E6

©Sa Majesté la Reine du chef du Canada 2010

ISSN 1919-6849 (version imprimée)
ISSN 1919-6857 (version en ligne)
MPO/2008-1493

Date de modification :